Oh non ! tu n´es pas à la noce
Ces temps-ci, pauvre vieux mérinos.
Si le Rhône est empoisonné,
C´est toi qu´on veut incriminer.
Les poissons morts, on te les doit,
Bête damnée, à cause de toi,
Tous les abreuvoirs sont croupis
Et les poules ont la pépie.

C´est moi qui suis l´enfant de salaud,
Celui qui fait des ronds dans l´eau,
Mais comme j´ai pas mal de culot,
Je garde la tête bien haute.
Car si l´eau qui coule sous les ponts
D´Avignon, Beaucaire et Tarascon,
N´a pas toujours que du bon
Mon Dieu ! c´est pas ma faute.

Plus de naïades chevelues,
Et plus de lavandières non plus,
Tu fais sombrer sans t´émouvoir
L´armada des bateaux lavoirs.
Et le curé de Cucugnan
Baptise le monde en se plaignant
Que les eaux de son bénitier
Ne protègent plus qu´à moitié.

A la fontaine de Vaucluse,
Plus moyen d´taquiner les muses
Vers d´autres bords elles ont fui
Et les Pétrarques ont suivi.
Si la fontaine de Jouvence
Ne fait plus d´miracle en Provence,
Lave plus l´injure du temps,
C´est ton ouvre, gros dégoûtant !

Oh non ! Tu n´es pas à la noce
Ces temps-ci, pauvre vieux mérinos,
On veut te mettre le fardeau
Des plaies d´ l´Egypte sur le dos.
On te dénie le sens civique
Mais calme, fier, serein, magnifique,
Tu traites tout ça par dessous
La jambe. Et puis baste ! Et puis zou !