Le temps joli de l’Impasse

La grille s’est refermée, Impasse Florimont
Le rideau est tombé sur un temps révolu
D’une plainte rouillée, la porte sur ses gonds
A fait un dernier tour et doucement s’est tue

C’est un pauvre logis, triste sans goût ni grâce,
Un passage étriqué, même pas une rue
On raconte qu’une fée apparue dans l’Impasse
Révéla au grand jour un poète inconnu.

Par miracle, de la cour s’éleva un grand chêne
Bruissant de mélodies dans le ciel alentour
Chaque feuille emportée aux vents qui se déchainent
Aux horizons lointains chanta ses mots d’amour

Puis stupeur sur la ville un jour d’Octobre terne
Marquant d’une croix noire cet automne maudit
La foule au rendez-vous dans les bistrots en berne
Toute réserve bue l’a pleuré comme on prie.

Trois petits chats depuis, félines sentinelles
Guettent inlassablement de leurs yeux gris de pierre
Le retour de celui qui depuis la ruelle
Dans ce coin de Paris fît naître une lumière.

Car bien loin du silence glacé des cimetières
Aux tombes alignées qui font trembler d’effroi
Son chant résonne encore aux confins de la terre
Campés, comme à l'affût ils entendent sa voix

C’est le lieu où son âme à tout jamais repose
A l’abri des vieux murs qui l’ont vue s’éveiller
Que l’on garde à jamais dans la mansarde close
L’œuvre de ce poète couchée dans ses cahiers.

Que le temps joli reste, Impasse Florimont
La guitare au piquet pudiquement s’est tue
D’une plainte rouillée, la porte sur ses gonds
Garde le lieu sacré et ne s’ouvrira plus.

Kalou KARA

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